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Enseigner pour apprendre (LdL): La conceptualisation comme source de bonheur


Jean-Pol Martin: Lernen durch Lehren: Konzeptualisierung als Glücksquelle. In: Olaf-Axel Burow, Stefan Bornemann (Hrsg.): Das große Handbuch Unterricht & Erziehung in der Schule. Carl Link Verlag, 2018. S. 345–360. ISBN 978-3-556-07336-0.

Introduction

Au début des années 80 l’auteur de cet article, professeur de francais langue étrangère à l’Université d’Eichstätt et vacataire au lycée Willibald eut l’idée de déléguer des tâches d’enseignement à ses élèves (Martin 1985). Il voulait en premier lieu augmenter leur participation verbale, car une langue s’apprend en parlant. De plus assumer des tâches d’enseignement conduirait les apprenants à communiquer de facon intense et authentique, donc à accroître leurs compétences de communication. Enfin cette pratique accroîtrait leur motivation car il seraient plus impliqués dans le processus du cours. Tous ces objectifs furent atteints. En particulier l’accroissement de la motivation des élèves fut spectaculaire. A la recherche d’une explication scientifique pour ce bond motivationnel l’auteur s‘appuya sur les théories des besoins (Maslow) mais également sur les neurosciences, qui à cette époque ne jouaient qu’un rôle marginal dans les sciences de l’éducation.

1.Lernen durch Lehren (enseigner pour apprendre)

La méthode „Lernen durch Lehren“ (LdL) sous sa forme actuelle existe depuis 1985 (Martin, 2004, Grzega, 2011, p.13). D’abord limitée à l’apprentissage des langues l’application de cette méthode s’élargit successivement à d’autres disciplines, d’autres phases de l’apprentissage et d’autres cycles et domaines d’enseignement. Au cours des dernières décennies les travaux et publications sur LdL ont atteint un volume considérable (Oebel, 2009, bibliographie sur LdL, p.507 et suivantes).  C’est pourquoi nous ne rappelons ici que le caractéristiques principales du dispositif LdL:  „Lorsque des apprenants abordent de facon autonome des contenus à transmettre à leurs condisciples en classe, lorsqu’à l’issu de leurs présentations ils s’assurent que leurs camarades ont bien compris ce qu’ils leur ont expliqué et lorsqu’enfin par une série d’exercices ils veillent à ce que les informations soient bien assimilées et mémorisées, ce dispositif est désigné comme étant ‚Lernen durch Lehren‘ (LdL), ‚enseigner pour apprendre‘.“  

Cette définition tirée de l’article de base sur la théorie et la pratique de LdL („Weltverbesserungskompetenz als Lernziel?“, Martin 2002) résume la méthode en peu de mots mais suffisamment clairs. Les nouveaux contenus sont répartis en petites unités confiées à deux élèves par unité et ceux-ci ont la tâche de l’enseigner aux autres en plénière. Les préparations aux présentations ont lieu en classe. L’expérience montre qu’après une courte phase d’adaptation la plupart des apprenants sont en mesure de présenter avec compétence les contenus à leurs camarades et de les leur faire assimiler et mémoriser (Cau, 2015).

2.Le bonheur: besoins fondamentaux, contrôle, flow et LdL

Les ouvrages sur le bonheur sont extrèmement nombreux (Bormans 2011). On peut définir le bonheur comme un état de bien-être stable, avec des écarts vers le haut ou vers le bas. Ce bien-être est dû à la satisfaction de besoins et à leurs corrélaires physiologiques (par exemple la production de dopamine, d’oxytocine ou d’adrénaline). Sous certaines conditions le sentiment de plaisir atteint une forte intensité, comme c’est le cas pour le flow  (Csikszentmihalyi 1999) qui peut être limité dans le temps ou durer plusieurs jours ou plusieurs mois. Si on veut que des élèves, des étudiants ou des collaborateurs éprouvent des sensations de bonheur, il est  conseillé de les placer dans des structures génératrices de flow.

Face à la méthode LdL il se pose la question de savoir quels besoins sont mieux satisfaits lorsque les contenus sont transmis non pas par l’enseignant mais par des élèves.

2.1. Les besoins fondamentaux selon Maslow

La pyramide des besoins

maslow

Le modèle de Maslow (Maslow 1981) a été largement pris en considération par le public et il n’est pas nécessaire ici d’en discuter les modalités. Maslow présente un tableau des besoins qui poussent l’être humain à agir. S’ils parviennent à atteindre un certain niveau de satisfaction, un sentiment de bien-être relativement stable s’instaure. Maslow distingue plusieurs paliers, partant des besoins physiologiques, dont la satisfaction est indispensable à la survie de l’individu, puis passant au besoin de sécurité, à celui d’appartenance et de reconnaissance sociales, l’étape supérieure étant le besoin de réaliser ses potentialités et enfin le besoin de sens, peut-être aussi de transcendance.

La méthode LdL semble plus que les dispositifs de type cours magistral répondre aux besoins fondamentaux décrits par Maslow: en partant de la base de la pyramide, donc des besoins physiologiques, on constate que LdL conduit à plus d’activités physiques en cours. Les élèves travaillent en binôme, dessinent des affiches, leurs présentations incluent des pantomimes et des saynètes. Le besoin de sécurité est pris en considération  puisque dans le cadre des présentations ils gagnent de plus en plus de confiance en eux. Afin que les élèves ne soient pas anxieux pendant les cours, les heures de classe sont complètement libérées de toute notation.  Les évaluations sont effectuées dans le cadre de compositions et de devoirs sur table. Lorsque les élèves font eux-même les cours leurs besoins d’appartenance et de reconnaissance sociale peuvent être mieux satisfaits puisqu’ils travaillent en binôme, ce qui les rapproche, et lorsque leurs présentations/cours sont réussis, ils jouissent des applaudissements de leurs camarades et du professeur. La réalisation des potentialités  est favorisée par le fait que chaque élève peut utiliser ses compétences particulières dans la présentation des contenus, par exemple ses dons musicaux ou picturaux. De ce fait et d’une facon générale tous les participants sentent que leurs activités s’inscrivent dans un cadre humainement ambitieux qui fait sens.

2.2. Le besoin de contrôle

La recherche sur les émotions insiste sur l’importance du sentiment de contrôle (Österreich 1981, 24ff). Dörner (1983, p.433) constate: „Un caractère essentiel des émotions semble être, que celles-ci constituent des réactions à des expériences de perte de contrôle, à la récupération du contrôle, au fait de disposer ou non de contrôle. (…) La perte de contrôle provoque des sentiments de peur, de crainte, d’angoisse. La récupération du contrôle déclanche des sensations de fierté, die triomphe, de joie.“  Le contrôle est donc existentiel pour la survie de l’individu. La perte définitive de contrôle conduit à la mort. Le sentiment de contrôle signalise qu’on est apte à se maintenir en vie. Or se maintenir en vie est le but de toute activité et de chaque action.

Dans ce contexte on peut constater que tous les besoins fondamentaux désignés par Maslow peuvent être classés sous une catégorie: le besoin de contrôle. En effet les besoins physiologiques correspondent  à la tâche de maintenir l’organisme en état de fonctionnement en lui conférant les soins nécessaires, notamment en lui fournissant de l’énergie. Le seul fait de se laver les dents correspond à cette exigence, puis le petit déjeuner et toutes les activités développées pour maintenir l’organisme en bonne santé. En ce qui concerne la sexualité, qui fait partie des besoins physiologiques, elle ne s’applique pas à la survie de l’individu mais à celle de l’espèce. Les besoins physiologiques se manifestent lorsqu’il y a une nécessité d’agir pour que le fonctionnement de l‘organisme soit assuré et maintenu sous contrôle. Au niveau supérieur, le besoin de sécurité, il s’agit également de contrôle: l’individu se sent bien, lorsqu’il n’est  pas menacé et lorsqu’il contrôle son environnement. Le besoin d’appartenance sociale  correspond au contrôle de la sphère sociale. Lorsqu’une personne fait partie d’un réseau humain, elle dispose de davantage de ressources pour maîtriser son existence. Le phénomène est le même en ce qui concerne le besoin de reconnaissance. La considération sociale donne confiance et renforce le sentiment de contrôler son champ de vie. Au palier suivant nous quittons la sphère des besoins liés à un manque.  Avec le besoin de réaliser ses potentialités  nous sommes dans le domaine de l’expansion. Il ne s’agit pas seulement de garder le contrôle mais de l’augmenter: lorsqu’on se sent des dons, par exemple musicaux, on a le désir de mettre ces capacités en  oeuvre et de conquérir le vaste monde de la musique pour le contrôler. Il en est de même pour les activités sportives, pour l’acquisition de savoirs, pour la découverte de nouvelles contrées. De cette facon notre carte cognitive et émotionnelle s’élargit. On „contrôle“ de plus en plus de domaines dans notre monde. Enfin le besoin de sens peut être également considéré comme appétit de contrôle. L’individu tend à comprendre les ressorts et éléments de son existence. Il veut savoir ce qui le pousse à agir, il veut découvrir les raisons de ses succès et de ses échecs et identifier les causalités. La religion et la philosophie s’efforcent de livrer des systèmes d’explication qui confèrent un sentiment de contrôle et de sécurité. Non seulement pour le temps de l’existence, mais également pour ce qui se passe après la mort.

2.3. Le traitement de l’information (par le cerveau) et le contrôle

Le traitement de l’information par le cerveau n’est pas le but mais un moyen. Sans que notre cerveau traite de facon permanente les informations auxquelles il est confronté l’organisme perdrait très rapidement le contact avec son environnement et il ne serait plus en mesure de vivre. Il doit garder continuellement le contrôle cognitif de ce qui l’entoure.

Au cours de ses recherches sur la motivation Portele (1975) consacre son attention aux émotions positives que le traitement de l’information déclenche au niveau des réseaux neuronaux. Pour que ces émotions soient positives, il faut que le cerveau soit confronté à des stimuli présentant certaines caractéristiques:

 „1. Les organismes essaient d’éviter la suractivation oubien de la réduire. Ils essaient d’éviter également la sousactivation en augmentant l‘activation. Ils cherchent donc une situation d‘activation optimale. (…)

  1. Pour atteindre un état optimal d‘activation, l’organisme doit sans arrêt intégrer des nouveaux stimuli, car l’activation déclenchée par un stimulus se réduit par un phénomène d‘adaptation. (…) L’état stable qui est recherché est le processus du traitement de l’information, c’est à dire la réduction constante de l‘écart, la constitution sans arrêt renouvelée d’une cohérence. (…)“

(Portele 1975, 235 f.)  (traduction en francais de l’auteur)

Traiter des informations est une activité gratifiante. Toutefois pas pour toutes les informations. Les stimuli doivent remplir certains critères:

  • La quantité: pas trop mais suffisamment quand même
  • Complexité: pas trop complexe mais pas trop simple
  • Flux: pas trop vite mais pas trop lent

Pour obtenir une activation optimale et par conséquent une forte motivation il faut que les élèves aient la possibilité:

  • de vouer leur attention totale et sans entrave aux stimuli;
  • d’être confrontés à des informations qui les motivent de facon continue à les traiter.

Le traitement de l’information et LdL

Dans les cours de type magistral les stimuli proviennent en principe du professeur. Aussi bien le volume des informations que la rapidité du flux sont contrôlés par l’enseignant. Les apprenants sont contraints de se concentrer sur une seule source et d’adapter à cette source leur capacité à traiter de l’information. Ils ne peuvent éviter la suractivation ou la sousactivation que dans de rares cas. C’est de cette facon que l’ennui s’installe. Dans le cadre de LdL les élèves ont la tâche de présenter des contenus du programme fixés d’avance et de les faire assimiler par leurs camarades. Ils doivent organiser les informations contenues dans leurs textes. Cela signifie qu’ils doivent sélectionner les contenus qu’ils présenteront plus tard à la classe. Dans cette phase déjà ils sont libres, sans contrainte extérieure, de réguler le flux des informations sur lesquelles ils travaillent. Leur tâche consiste à

  • comprendre les contenus destinés à être transmis et en sélectionner les éléments essentiels (réduction de complexité) ;
  • effectuer une didactisation de facon que les camarades soient motivés de manière optimale et soient conduits à une compréhension si possible parfaite (élaboration de transparents et d’affiches, de diagrammes, de questions sur les contenus, organisation des travaux de groupes);
  • prévoir une phase de consolidation de sorte que le groupe mémorise et automatise les contenus.

Toutes ces tâches exigent des élèves de gros efforts intellectuels. C’est donc un challenge considérable pour le cerveau.

La possibilité de choisir les informations (stimuli informatifs) de manière libre et autonome et de les traiter suivant un mode décidé par eux-mêmes, de sorte que le cerveau soit récompensé (dopamine, adrénaline), donc que du „bonheur“ soit créé, assure une motivation durable et stable.

2.4 Comportement explorateur et flow

Il existe la volonté non seulement de maintenir le contrôle cognitif pour maitrîser son champ d’activité mais aussi de l’élargir. Nous recherchons d’autres champs d’action pour en prendre le contrôle cognitif. Cela concerne l’espace, mais aussi le temps. Nous désirons connaître d’autres pays mais aussi d’autres époques, passées ou futures. Cette attitude doit être encouragée dans la classe. Dörner (1983, 331ff.) dégage les caractéristiques de personnalités compétentes dans la résolution de problèmes et met en relief leur attitude exploratrice. On désigne un comportement explorateur comme étant l’attitude d’une personne qui cherche des situations peu définies et comportant un haut degré d’incertitude. La logique qui se développe est la suivante: les individus explorateurs sont à la recherche de champs qu’ils ne connaissent pas et où ils tentent de s’imposer en trouvant des solutions aux problèmes qui se posent. Chaque nouvelle expérience est enregistrée sous forme de schéma abstrait, cognitif. Plus nous faisons d’expériences, plus nous enregistrons de schémas et plus notre carte cognitive s’élargit. Une carte cognitive vaste nous fournit le contrôle sur des domaines de plus en plus larges, elle nous permet de traiter davantage de nouvelles expériences au niveau cognitif et nous protège contre les chutes émotionnelles. Elle nous donne une base solide pour maîtriser les nouvelles situations. Le sentiment de contrôle se renforce, la confiance en soi augmente et le souhait de chercher à nouveau des champs inconnus, donc de se comporter de manière exploratrice.

L’attitude exploratrice doit être récompensée. Le sentiment de contrôle qui s’installe lorsqu’on a maîtrisé une tâche difficile est particulièrment intense dans le cadre du flow (Csikszentmihalyi1999). Suivant Csikszentmihalyi le flow est un sentiment de flux, d’oubli de soi-même au cours de l’action. Les conditions en sont les suivantes:

  • Pénétrer dans des champs inconnus
  • Aborder des situations dont on ne connait pas l’issue et dans lesquelles on porte une responsabilité
  • Résoudre des problèmes, maitriser des situations difficiles
  • Investir toutes ses propres ressources
  • Sentiment de dépasser ses propres limites
  • Garder le contrôle sur ses propres activités et sur le champ d‘action

En principe chaque activité exploratrice exigeante peut mener au flow. Les disciplines sportives comme la voile ou l’équitation présentent les critères qui mènent au flow. Faire des exposés, enseigner, diriger des ateliers conduisent à des phases de flow lorsqu’on garde le contrôle de la situation.

Comportement explorateur dans le cadre de LdL

La tâche de présenter de nouveaux contenus déclenche toute une série d’activités dont l’objectif est la maîtrise cognitive d’un savoir. Comme en même temps les élèves doivent établir une stratégie didactique , diverses options pour les présentations doivent être élaborées et mémorisées afin que dans la situation concrète du cours suivant l’évolution du processus ils disposent de plusieurs possibilités. Préparer un cours signifie développer des scénarios complexes pour les avoir en réserve pendant le cours et avoir un maximum de contrôle. Si cette tâche est déléguée aux apprenants, il s’ouvre pour eux un champ illimité pour exercer un contrôle cognitif à un haut niveau. Si dans la situation concrète les élèves réussissent à maîtriser la situation, ils sont récompensés par un flow intense.

2.5 Donner des instruments pour faciliter le contrôle cognitif

La recherche sur les besoins avec la pyramide de Maslow et les neurosciences avec les découvertes sur le traitement de l’information au niveau du cerveau livrent des instruments très utiles pour comprendre le fonctionnement des individus ou des groupes. Elles mettent à notre disposition des modèles d’explication pour nos comportements. Ils est indispensable de confier ces instruments aussi bien aux professeurs  qu‘aux élèves. Nous ajoutons, pour compléter, certains éléments systémiques.

2.5.1 Les systèmes sont assujettis à des forces antinomiques

A l’aide des théories systémiques il est possible de transmettre des modèles  supplémentaires d’analyse, d’une grande utilité heuristique.  Ainsi les observations  faites en biologie, en physique et en psychologie révèlent que les entités conservent leur cohésion interne en s’efforcant constamment de maintenir un équilibre entre l’intégration et la différenciation. Ils sont de facon permanente soumis à des forces centripètes et centrifuges et doivent, pour maintenir leur intégrité veiller en investissant beaucoup d’énergie à ce qu’aucune des deux forces ne prennent définitivement le dessus (voir aussi la loi de l’entropie). Si les forces centripètes l’emportent, le système implose. Dans le cas contraire le système se décompose. On peut appliquer cette observation à des individus ou à des groupes. Les êtres se trouvent soumis à des besoins antinomiques.

Système de besoins antinomiques

Contrôle Manque de contrôle
Ordre Chaos
Clarté Flou
Simplicité Complexité
Intégration Différenciation
Société Individu
Contrainte Liberté
Concret Abstrait
Linéaire Non-linéaire
Centralisation Décentralisation

Les êtres recherchent de manière consciente l’ordre, la clarté, la simplicité… Mais très vite ces structures les ennuient. La nature prévoit que les êtres vivants s’entrainent de manière continue  à réduire l’incertitude, le chaos, la complexité et le flou. Les êtres sont construits de telle facon qu’ils vont vers le chaos, l’incertitude et la complexité pour les transformer en ordre, clarté et simplicité. L’état qu’il doivent sans arrêt s’efforcer d’atteindre pour survivre est l’équilibre entre les deux ensembles de besoins antinomiques. La récompense qu’ils obtiennent pour ces efforts est le flow. Comme un équilibre stable ente les deux groupes de besoins antinomiques ne peut jamais être définitivement atteint, l’être est sans arrêt obligé d’essayer de rétablir l’équilibre. A peine sommes nous inclus dans un groupe de personnes, aussitôt nous veillons à garder notre autonomie et notre individualité et nous refusons d’être assimilés.  Nous exigeons la liberté, mais si on nous laisse beaucoup de liberté, nous souhaitons des directives claires et des sanctions si elles ne sont pas suivies.Dès que cette pression est exercée, nous réclamons plus de liberté. Ceci concerne toutes les antinomies. Les partis politiques utilisent ces groupes de besoins en s’adressant sciemment à l’une ou l’autre tendance. Ainsi les partis conservateurs cherchent à satisfaire le besoin d’ordre et de calme. Les progressistes par contre s’adressent à des groupes de personnes qui favorisent la nouveauté et les changements et sont prêts à accepter l’incertitude. Il est très important d’être conscient de ces phénomènes car cela nous permet d’analyser les raisons pour lesquelles nous  nous sentons peu à  l’aise dans certaines structures et que nous sommes désireux de les transformer. Mais il est encore beaucoup plus important que ces instruments cognitifs nous permettent de mieux comprendre les êtres humains et que nous puissions agir dans des groupes dont nous portons la responsabilité en tenant compte, dans la situation donnée, des besoins actuels des membres. Pour chacun le degré de liberté ou de contrainte souhaitées est différent suivant la situation. Il n’est pas possible, dans un groupe, d’offrir à chaque individu le degré de liberté ou de contrainte qui à un moment donné le satisfait pleinement.

2.5.2 Pensée dialectique

La tension entre l’ordre et le chaos, les forces centripètes et centrifuges, entre l’intégration et la différenciation, entre le rationalisme et l’empirisme, entre l’esprit et la matière ont été très tôt découvertes en philosophie (Héraclite). Une oeuvre particulièrement marquante est celle de Hegel dans sa description du processus dialectique au cours de l‘histoire. En effet il semble que nous puissions observer une évolution déterminée par une thèse, und antithèse et une synthèse. Dans le quotidien on fait l’expérience que chaque idée, chaque action entraîne une idée ou une action contraire. Ce phénomène est fructueux car une réaction contraire nous force à réfléchir et à proposer, si notre réflexion est bien menée, une synthèse intégrant thèse et antithèse. La pensée dialectique conduit régulièrement à une intégration à un niveau supérieur de positions qui au départ semblaient contradictoires et qui maintenant se joignent pour former un équilibre et continuer à se développer. En particulier pour les acteurs politiques cette conscience de la dialectique peut être très fructueuse, car elle permet d’aborder les problèmes ensemble, au delà des affrontements de politique partisane.

2.6. Conceptualisation

Au niveau du cerveau le traitement de l’information est accompagné de sentiments positifs. Mais c’est surtout la conceptualisation qui est récompensée par le flow. Conceptualisation signifie la construction de schémas cognitifs qui compriment un ensemble volumineux d’informations sous la forme de modèles compactes et inducteurs d’activités. Par exemple un résumé de la littérature francaise de ses débuts à aujourd’hui, l’histoire de l’Europe des origines jusqu’aux temps modernes, etc. Réaliser ce type de résumés exige un travail intense pour réduire la complexité. Par un effort intellectuel considérable des savoirs extrèmement complexes sont réduits et comprimés de manière qu’ils puissent être communiqués à des apprenants d’une facon motivante. Déjà au cours de cette phase de préparation les efforts sont récompensés par le flow. Voici un exemple décrivant les différentes phases suivies lorsqu’on s’apprête à présenter la pensée hégelienne: dès le début de ce travail de préparation on a virtuellement devant les yeux le groupe auquel on enseignera Hegel. On imagine en pensée les réactions positives du public. Les efforts de conceptualisation sont d’une part motivés par le flow inhérent au travail de réflexion sur les contenus, d’autre part par l’anticipation du flow qu’on ressentira lorsqu’on présentera les contenus de facon attrayant à la classe. Dans le cadre de LdL ces activités sont réalisées par les élèves eux-mêmes avec pour corollaire du flow une augmentation considérable de la compétence et de la motivation.

Voici les étapes de réduction de complexité à l’exemple de Hegel:

  • Première étape: la masse énorme d’informations à maîtriser (la vie et l’oeuvre de Hegel) induisent en nous en sentiment d’impuissance et de perte de contrôle.
  • Deuxième étape: nous divisons le contenu en petites portions, de sorte que le contrôle commence à s’exercer sur les différents éléments du contenu (on comprend ce que Hegel veut dire par „être en soi“, „être autre“ et „être en soi et pour soi“. Toutefois ce qui domine encore à ce stade c’est le sentiment d’impuissance!
  • Troisième étape: Peu à peu les parties qu’on ne comprenait pas diminuent. Ce qu’on comprend devient un objet ludique. Il est par exemple amusant d’utiliser le terme „être en soi et pour soi“ parce que son sens n’est pas vraiment compliqué mais que le terme a l’air absurde. Je me réjouis d’avance à l’idée que mes participants s’amuseront, eux-aussi, à utiliser ce terme.
  • Quatrième étape: les différents éléments décrits (chez Hegel par exemple „l’esprit subjectif“, „l’esprit objectif“ et „l’esprit absolu“) vont être peu à peu intégrés et nous voyons apparaître un ensemble clair et compacte, qui nous donne de plus en plus envie de le communiquer à nos participants. On a de plus en plus envie de présenter Hegel, qui „finalement n’est pas si compliqué“.
  • Cinquième étape: Toute cette transmission de schémas cognitifs (Hegel) n’a de sens que s’il conduit à des actions. Les participants  vont comprendre la dialectique de Hegel et von utiliser ce principe dans l’interprétation de leur quotidien. Comme ils ont compris Hegel et sa dialectique, comme ils le maîtrisent et le contrôlent, ils veulent aussi communiquer cette dialectique aux autres!

On peut en fait constater que le traitement de l’information fournit une contribution au contrôle, mais que le contrôle stable, généralisé, nécessaire à la survie ne peut être atteint que par une conceptualisation permanente. LdL offre la possibilité d’habituer les élèves à cette conceptualisation permanente et à intérioriser les techniques nécessaires pour cela.

3. Réflexion et bonheur du point de vue de la philosophie

Nous nous sommes appuyés jusqu’ici exclusivement sur les sciences humaines. Mais il est intéressant de voir si la philosophie confirme nos constatations sur les besoins, le bonheur et le rôle que joue la réflexion dans la hiérarchie des plaisirs et joies.  Ce qui caractérise l’antiquité grecque, c’est l’attitude eudémonique, qu’on retrouve plus tard chez les utilitaristes, notamment chez Stuart Mill. La satisfaction des besoins est considérée comme source de bonheur, en remarquant bien qu’il y a une différence entre les besoins primitifs et les besoins de caractère plus élaboré. Les plaisirs les plus élevés sont ceux de l’esprit.

Pour illustrer cette attitude, citons Aristote avec un passage de l’éthique à Nicomaque (Aristote, 2010, S.17): „Mais ceux dont l’activité est de penser et qui cultivent cela en eux-mêmes, non seulement ils jouissent d’une meilleure constitution, mais encore ce sont eux que les Dieux aiment le plus. Car si les Dieux, comme on pense, prennent quelque peu en considération nos affaires humaines, on peut supposer qu’ils prennent plaisir à ce qui est le plus parfait et le plus semblable à eux – et c’est notre esprit – et qu’ils récompensent ceux qui aiment et respectent le plus l’esprit, parce que ceux-ci prennent soin de ce qu’ils aiment et agissent de facon droite et noble. Mais il est indéniable que toutes ces qualités se trouvent réunies à la perfection chez les sages. C’est pourquoi les sages sont les plus aimés des Dieux; si c’est le cas, les sages sont également les plus heureux.“

4. Les projets en tant que structures génératrices de bonheur

A la recherche de types d’activités qui exigent une conceptualisation permanente, qui contiennent un potentiel élevé pour la satisfaction des besoins fondamentaux et qui en même temps entretiennent un flow continu on découvre rapidement que cette structure est le projet. Ceci est particulièrement vrai pour la méthode LdL qui transforme les cours dans leur ensemble en projets: la responsabilité est supportée par les élèves dès le moment où le professeur leur remet les contenus qu’ils auront à faire assimiler à leurs camarades jusqu’à l’instant où ils pourront mesurer les résultats de leur enseignement au cours des interrogations et évaluations dans la classe à la fin de la séquence. Cela est valable dès la première heure de cours au début de l’année jusqu’à la dernière heure avant les vacances. Dans le cadre de ces structures, suivant la méthode LdL, toutes les conditions sont remplies en ce qui concerne la satisfaction des besoins fondamentaux: appartenance sociale, reconnaissance sociale, réalisation des potentialités et sens, puisque l’apprentissage intense de contenus pertinents est une activité pleine de sens.

5. La globalisation et l’extention du champs de conceptualisation

Dans la salle de classe l’attitude exploratrice et le besoin de conceptualiser rencontrent très rapidement des limites. Le numérique et la globalisation ont ouvert de nouveaux espaces! Ce phénomène arrive au bon moment, car dans le cadre de la méthode LdL les élèves acquièrent rapidement des compétences qui cherchent des domaines d’extention. On peut définir métaphoriquement l’internet comme un cerveau et constater que les individus grâce aux nouveaux moyens de communication sont en mesure d’établir des interactions stables avec des partenaires dans le monde entier, comme le font les milliards de neurones dans le cerveau. De même que les idées émergent sur la base d’interactions neuronales, de même les individus peuvent entrer en interaction et créer une architecture semblable à un réseau neuronal, puis conceptualiser et produire collectivement du savoir.

Pour cela les acteurs, dans notre cadre les élèves, doivent se conduire comme des neurones. Martin (2011a) a établi pour cela des règles de comportement (non sans une certaine ironie):

Se comporter comme un „neurone“

  1. Les neurones sont ouverts et transparents
  2. Les neurones communiquent leur savoir instantanément. Ils ne veulent pas se mettre en valeur par rapport aux autres
  3. Comme les neurones n’ont pas peur de faire des fautes, ils réagissent spontanément
  4. Quand les neurones sont contactés, ils répondent aussitôt
  5. Les neurones essaient constamment de garder le contact entre eux; ils n’ont pas peur d’agacer
  6. Les neurones ne sont pas vexés
  7. Les neurones ne font pas de pause; ils ne partent en vacances que lorsque leur travail est achevé
  8. Les neurones ont une attitude ludique face au flou
  9. Les neurones pratiquent une démocratie de base
  10. Attention à l’addiction! On ne doit se comporter en neurone que si la situation l’exige!

6. La conceptualisation en tant que besoin fondamental et droit de l‘homme
La recherche sur le bonheur (Bornmans 2011) conduit à la constatation que si on laisse de côté les spéculations philosophiques et métaphysiques le bonheur de l’être humain dépend de la satisfaction des besoins décrits dans la pyramide de Maslow. Cependant la pyramide de Maslow ne tient pas compte de la réflexion/pensée (traitement de l’information et conceptualisation). Ceci est dû au fait que c’est seulement au cours des dernières décennies que les neurosciences nous ont éclairés sur le fonctionnement du cerveau. Si cette analyse est pertinente, les droits de l’homme doivent être reformulés. La déclaration universelle des droits de l’homme a été rédigée en 1948 sous d’autres prémisses que celles qui règnent aujourd’hui. La terminologie reste marquée par la religion et la philosophie, ce qui apparaît dans le flou des concepts. C’est ainsi que le concept central de „dignité“ est imprécis et permet des interprétations innombrables, de sorte qu’il n’est pas opérationnel. Ceci s’applique à d’autres concepts clés des droits de l’homme tels que la fraternité, la justice, l‘égalité. Une référence aux besoins fondamentaux ouvre de nouvelles possibilités pour spécifier ces droits au quotidien et dans la législation. Si pour l’homme une condition du bonheur est la réflexion et la participation à la réflexion collective sur l’avenir de l’humanité (Martin 2009), il faut impérativement placer le droit de réflexion en tête des droits de l’homme.
Voici la proposition de Martin (sous chaque article est stipulé le numéro de l’article de la Déclaration Universelle des droits de l’homme qui est relié thématiquement au texte correspondant):
Nouveaux droits de l’homme et de la nature

Préambule: Le bonheur

Le but de chaque mesure est la création de structures (économiques, politiques, éthiques) qui garantissent une augmentation d’épanouissement pour la nature et de bonheur pour tous les êtres vivants. Les articles ci-dessous en fournissent les conditions.
Déclaration universelle: pas d‘article

Article 1: Droit de penser (droit à la réflexion)
Le besoin fondamental majeur de l’homme est la réflexion (traitement de l’information et conceptualisation). Toutes les conditions doivent être réalisées pour que tous les hommes aient accès aux informations et la possibilité physique de réfléchir et de conceptualiser. Penser de manière optimale nécessite la réalisation des articles 2 à 6.
Déclaration universelle: Art. 18, 19, 26, 27

Article 2: Santé
Toutes les mesures doivent être prises à l’échelle mondiale pour que les êtres vivants puissent satisfaire leurs besoins physiologiques. Ceci inclue le besoin de sexualité. La nature en tant que réservoir doit être protégée et son utilisation modérée.
Déclaration universelle: Art. 24, 25

Article 3: Sécurité (logement – travail)
Toutes les mesures doivent être prises à l’échelle mondiale pour créer des structures assurant un maximum de sécurité pour tous les êtres vivants. L’utilisation de la nature doit être modérée.
Déclaration universelle: Art. 3, 4, 5,6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 14, 15, 17, 22, 28

Article 4: Appartenance sociale
Toutes les mesures doivent être prises pour protéger les êtres vivants de la solitude et de veiller à ce qu’ils évoluent dans un cadre social qui les soutiennent.
Déclaration universelle: Article 1, 16, 20, 22, 25, 26, 27

Article 5: Réalisation des potentialités et participation
Toutes les mesures doivent être prises pour que les êtres épanouissent tous leurs potentiels. Toutefois il faut veiller à ce qu’il soit fait une utilisation modérée de la nature. Comme l’épanouissement de l’individu ne peut s’opérer que dans le cadre des structures dans lesquelles il évolue, il faut qu’il ait la possibilité de les influencer et de les modifier suivant ses besoins et ceux de ses concitoyens. Donc de participer. La société est dépendante des apports en ressources intellectuelles, émotionnelles et matérielles des êtres qui la composent.
Déclaration universelle: Article 12, 13, 17, 18, 19, 20, 21, 23, 24, 25, 26, 27

Article 6: Sens
Toutes les mesures doivent être prises pour que les êtres ressentent leur vie comme satisfaisante et ayant du sens.
Déclaration universelle: pas d‘article

Un avantage de cette nouvelle formulation des droits de l’homme réside dans le fait qu’elle est opérationnelle. Tandis que „la dignité humaine“ ou „la liberté“ sont difficiles à exiger d’une institution compte tenu du caractère abstrait de ces concepts, le droit à disposer de conditions favorables à la réflexion est plus facile à réaliser de facon concrète. Par exemple un prisonnier, qui ne dispose pas d’accès aux informations, qui ne peut participer à des travaux en groupe sur des sujets qui l‘intéressent, qui est contraint d’effectuer des tâches de routines qui n’exigent pas de lui d’effort intellectuel pourra faire valoir son droit au traitement de l’information et à la réflexion. Ceci est valable pour un nombre considérables d’êtres humains qui sur leur lieu de travail n’ont pas à fournir d’effort intellectuel. Si le droit au traitement de l’information et à la conceptualisation sont élevés au niveau de droits fondamentaux, ceci implique une nouvelle organisation de la société avec comme objectif de mobiliser toutes les capacités intellectuelles mondiales, afin que nous puissions résoudre les problèmes qui se posent à l’homme et créer un monde meilleur.

7. Introduire la théorie de la méthode LdL dès la première heure de cours et dès l’âge de 10 ans

La qualité de la méthode LdL réside dans sa cohérence. Toutes les mesures péagogiques et didactiques sont fondées sur la théorie des besoins et sur les neurosciences. Il est essentiel que les élèves eux-mêmes soient familiarisés avec la théorie, car le succès de LdL dépend fortement de l’attitude adoptée et automatisée par les apprenants. C’est pourquoi les enseignants qui appliquent LdL de manière compétente communiquent la théorie dans leurs nouvelles classes dès les premières séances.

Voici l’exemple de deux collègues très impliqués dans le cadre du développement et de la diffusion de la méthode. Tous deux utilisent pour l’introduction de la théorie dans leurs classes l’article de base „Weltverbesserungskompetenz als Lernziel?“ (Martin 2002).

7.1 Peter Ringeisen (Dr.-Johanna-Decker-Gymnasium Amberg)

Peter Ringeisen (https://peterringeisen.wordpress.com/lernen-durch-lehren/ ) est professeur d’allemand, d’anglais et d’activités théâtrales au lycée Dr.-Johanna Decker-Gymnasium à Amberg. En premier lieu il distribue un glossaire comportant des explications des mots nouveaux pour les élèves. Ces mots sont très complexes surtout pour des élèves âgés de dix ou onze ans.

Peter Ringeisen: explication des mots utilisés dans l’article „Compétence à améliorer le monde comme objectif de l’apprentissage?“ (Jean-Pol Martin, 2002)

Par ordre d‘apparition dans le texte

Changement de paradigme: Changement de système, changement profond dans la facon de voir les choses  (paradigme: schéma, structure)

Didactique: La science de l’enseignement et de l‘apprentissage

Pédagogie: Science de l’éducation et de la formation culturelle

Caractère appellatif: Qualités qui sont attirantes pour les élèves et les motivent

Ressources: réservoir

Anthropologique: adjectif du substantif  „anthropologie“ (science de l’homme et de son évolution)

Cohérent:  logiquemen structuré

Opérationaliser: structurer un modèle théorique en petites unités de facon qu’on puisse le réaliser pas à pas concrètement en contrôlant le processus

Explorateur: prêt à découvrir des domaines inconnus

Cognitif: ayant trait à la connaissance intellectuelle; antonyme: affectif (causé par des émotions)

Intrinsèque: quelque chose qui appartient à une activité; exemple: quand quelqu’un effectue volontiers sont travail, parce que celui-ci lui fait plaisir et qu’il le trouve important, est motivé intrinsèquement; si par contre il le fait uniquement pour obtenir un salaire, ont dit que sa motivation est extrinsèque.

Antinomique: en contradiction (le substantif: une antinomie)

Postuler: dans ce cas: formuler une supposition

Physiologique: ayant attrait au corps

Meta-…: à un niveau supérieur; exemple: au milieu d’une discussion quelqu’un commence une „métadiscussion“ (donc une discussion sur la discussion, son sujet et son déroulement).

Linéarité: une description logique passant d’un point à l’autre sans oublier un élément ou intervertir des contenus (a priori: dès le début)

Herméneutique: cherchant le contenu d’un texte

Hypothèse: une supposition ne reposant pas sur une expérience et non démontrée

Métabolisme: ensemble des réactions chimiques qui se déroulent au sein d’un être vivant pour lui permettre de se maintenir en vie

Economie: usage réfléchi et sans gaspillage de ressources

Fidéliser: rendre fidèle, par exemple une clientèle ou un groupe

Transcendence:  surnaturel

Discours: conversation observant certaines règles

Altruiste: non égoiste

 

Tableau de Peter Ringeisen sur l‘article „Compétence à améliorer le monde comme objectif de l’apprentissage?“ (Martin 2002)

(Malheureusement en allemand comme l’article concerné „Weltverbesserungskompetenz als Lernziel?“)

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Commentaires sur facebook:

Peter Ringeisen:  4 mars 2016:

Voici mes tableaux „réducteurs de complexité“ résumant le contenu de l’article „Compétence à améliorer le monde…“ dans ma classe de 5e. Aujourd’hui au cours de la révision de la séance d’hier j’ai demandé aux élèves, des filles de onze ans, ce qui leur était resté en mémoire comme étant important. La première réponse: „L’attitude exploratrice, car de cette manière on apprend des choses nouvelles, on sait davantage et comme cela on a moins peur de continuer à explorer.“

Matthias Lausmann:  4  mars 2016, 23h.33

„Wow, Peter Ringeisen! Pour une cinquième c’est vraiment très complexe! Et ton écriture est comme  d’habitude remarquable!“

Peter Ringeisen: 4 mars 2016, 23h45

„Tu as tout à fait raison, Matthias – mais je leur ai laissé pas mal de temps pour comprendre, j’ai expliqué de facon détaillée ce que j’ai écrit au tableau. J’ai utilisé près de 3 heures de cours pour introduire la théorie. Mais je trouve cette investition de temps nécessaire, afin que les cours fonctionnent bien. L’année dernière j’ai pratiqué avec les mêmes élèves LdL pendant un certain temps, c’est pourquoi elles m’ont demandé de recommencer cette année, mais je n’avais présenté que très peu de théorie et je n’étais pas très satisfait des résultats. Je suis curieux de savoir comment cela va fonctionner cette année!

7.2 Isabelle Schuhladen Le Bourhis (Dr.-Max-Josef-Metzger-Schule Meitingen)

Un deuxième exemple confirmant l’importance de traiter dès le début et avec de très jeunes élèves la théorie de LdL est fourni pas Isabelle Schuhladen Le Bourhis, professeure d’allemand et de francais à la Dr.-Max-Josef-Metzger-Schule à Meitingen. Elle aussi fait lire à ses classes dès le début de l’année l’article „Compétence à améliorer le monde comme objectif de l’apprentissage?“ (Jean-Pol Martin, 2002). Au delà de cela, elle introduit d’autres conceptes de la théorie de Martin, notamment la métaphore du neurone. Enfin elle travaille avec ses élèves de manière approfondie sur le fonctionnement du cerveau au cours de l‘apprentissage.

Tous les résultats et toutes les réflexions débouchent sur une présentation par les élèves suivant le principe de LdL dans le cadre d’un projet prévu dans le programme minsteriel.

Extraits de facebook:

Isabelle: 8 juin 2017

„Je suis en train de préparer la 4e composition de ma classe de 6e, il s’agit d’un projet sur le thème de l’apprentissage. Nous avons cette année beaucoup travaillé là-dessus (théorie et pratique). Les élèves doivent présenter ce savoir dans le cadre de ce projet avec des explications imagées et motivantes (extraits de vidéos et articles de Jean-Pol Martin). Ils vont travailler en petits groupes, au maximum 3 par groupe.“

Isabelle: 20 Juin 2017

„J’ai commencé aujourd’hui le projet-composition dans ma 6e en allemand. Le sujet: „Nous vous expliquons comment on apprend en considérant le fonctionnement du cerveau!“ Les élèves doivent à l’aide de textes traitant des neurosciences trouver comment l’apprentissage fonctionne au niveau du cerveau et dégager les conséquences pour l’enseignement en classe. Pour cela ils disposent de l’article de base de Jean-Pol Martin „Compétence à améliorer le monde…“ et d‘une liste de liens vers des articles ou des videos sur ce sujet. Cela signifie que j’exige des élèves un travail scientifique. Naturellement ils doivent faire référence à leurs expériences personnelles (LdL, conseil de classe, classe à la campagne). Ils doivent par exemple écrire un conte de fées sur le comportement des neurones, rédiger un article pour une encyclopédie pour enfants, dans lequel ils expliquent le modèle anthropologique de Martin à des élèves du même âge, tourner une vidéo (comportement neuronal), réaliser des visualisations…

Les deux premières heures aujourd’hui ont très bien fonctionné. La classe a fait preuve d’un grand talent d’organisation, elle était très concentrée et surtout très motivée. Je vais résumer chaque jour sur facebook ce qui s’est passé, car mon but est entre autres de montrer que les élèves, quand ils ont confiance et quand on leur donne des responsabilités sont en mesure de réaliser des performances impressionnantes et de faire preuve de beaucoup de créativité. Et qu’ils apprennent énormément dans le cadre de cet enseignement.

Voici deux photos:

Les élèves préparent la présentation de l‘article „Weltverbesserungskompetenz als Lernziel?“ (Martin 2002).

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Préparation de la présentation der la pyramide des besoins de Maslow

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Isabelle: 22 Juin 2017

„Sujet: apprendre en tenant compte du fonctionnement du cerveau.

Dans une classe de 6e. 3e séance.
Ils analysent le modèle anthropologique de Jean-Pol Martin et le comportement des neurones (ils écrivent un conte de fées).
Tous sont enthousiasmés, profitent de chaque heure de libre pour lire des textes scientifiques et visionner des vidéos!“

Isabelle: 22 Juin 2017

„Sujet: apprendre en prenant en compte le fonctionnement du cerveau. Dans une classe de 6e. 3e séance.
Ils analysent le modèle anthropologique de Jean-Pol Martin et le comportement des neurones (ils écrivent un conte de fées).
Tous sont enthousiasmés, profitent de chaque heure de libre pour lire des textes scientifiques et visionner des vidéos!“

Isabelle: 27 Juin 2017

„Projet en classe de 6e
1. Présentation aujourd‘hui: le groupe de 3 élèves a présenté 3 sujets:
– Que se passe-t-il au niveau du cerveau pendant l’apprentissage (neurones, synapses, cellules gliales)?
– Comment se comportent les neurones?
– un conte de fées sur le „comportement des neurones“

Sans regarder sur leur feuille, sans nervosité, comportement corporel correspondant à leur tâche, langue claire et facile à comprendre, phrases courtes avec pauses adéquates: Wow!
La classe a très bien participé! Formidable!“

Le comportement du neurone:

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Comme Peter Ringeisen, Isabelle Schuhladen Le Bourhis distribue une liste de mots qui sont indispensables à la compréhension de la théorie LdL:

Liste des mots, que Isabelle Schuhladen Le Bourhis introduit dans sa classe de 6e.

(1) Antinomies

L’être humain n’est jamais satisfait de sa situation. Si l’ordre règne, il souhaite le désordre. Si tout est calme, il souhaite de l’activité. Nous essayons de trouver le mélange parfait, suivant les besoins de la classe.

(2) Bottom-up

Nous n’humilions pas nos camarades („c’est faux! Mais qu’est-ce que tu racontes! Tu ne comprends rien à rien!), mais nous les encourageons, nous recommencons sans arrêt, nous faisons de nouvelles tentatives, nous n’abandonnons pas, nous répétons continuellement und nous les soutenons!

(3) Comportement explorateur

Nous essayons beaucoup de choses sans vraiment savoir si cela va fonctionner. Mais nous faisons des tentatives et nous apprenons beaucoup par là! Car nous savons que les fautes sont permises et nécessaires! No risk, no fun!

(4) Culture de l‘erreur

Chez nous les fautes sont permises. Nous en introduisons même parfois dans nos textes exprès pour que nos camarades soient sans arrêt attentifs et concentrés! TOUS doivent participer activement! Ils se réjouissent quand ils peuvent corriger ceux qui enseignent! C’est par les fautes qu’on apprend!

(5) Flow

„Quand il y a quelque chose qu’on ne comprend pas, mais quand on s’aide mutuellement ou lorsqu’on trouve soi-même la solution, on a franchi un seuil et lorsqu’en plus on nous félicite, (Reconnaissance, compliment), on se sent très bien et on ressent un „flow“. Patrizia

(6) La classe en tant que cerveau

Notre classe est un cerveau: chaque élève est un neurone! Entre les élèves (ou neurones) se construisent de liens (ou synapses), car nous apprenons ensemble et les uns des autres. Chacun apporte son savoir. Ensemble nous construisons un nouveau savoir. Chaque neurone est important! Car chacun est  une ressource importante pour la classe!

(7) Conceptualisation

(8) Modèle anthropologique

Nous savons que les êtres humains ont différents besoins (voir la pyramide de Maslow). Notre but est de satisfaire ces besoins.

(9) Comportement neuronal

(10)Etre redondant et pénétrant: Voir comportement neuronal!

(11)Mobilisation des ressources

Chacun d’entre nous a des capacités. Grâce à LdL nous apprenons à reconnaître les compétences (talents) des autres et à les apprécier. Chacun d’entre nous a ses points forts! Nous faisons appel à nos compétences communes. De cette facon des synapses se forment, des liens, nous développons notre processus d’apprentissage en commun beaucoup plus vite que si nous restions isolés chacun pour soi!

(12)Sélection et réduction de la complexité

Nous ne pouvons par tout apprendre! Nous sélectionnons les informations les plus importantes (par exemple les informations qui sont pertinentes pour nous et notre situation)  >> et nous les mettons en réseau avec le savoir que nous avons déjà construit (à quoi des informations peuvent-elles me servir, dans quelles situations?) > Visualisation

(13)La métaphore des spermes >>> Celle que la classe de 3ème préfère à toutes les autres!

„Même si d’abord il n’y a aucune réaction, je continue à diffuser des millions d’impulsions dans le système (métaphore des spermes) dans l’espoir que l’une des informations atteigne son but et que quelque chose de peut-être extraordinaire surgisse (émergence)“ Jean-Pol Martin

Nous sommes rapides, n’avons pas de temps à perdre, réagissons aussitôt  ( = neurones – nous travaillons comme un cerveau), nous avons beaucoup d’idées (certaines sont reprises par les autres: génial!). Nous nous réjouissons  de chaque nouvelle impulsion et participons avec enthousiasme! Nous sommes très spontanés et créatifs. Nous sommes dans le flowt: cela rend heureux!

(14)Synapses

Liens entre les neurones (voir: la classe en tant que cerveau)

(15)Transparence

= Visibilité: nous voulons voir tout ce qui se passe et garder la situation sous contrôle

(16)Responsabilité

Notre professeure nous confie beaucoup de responsabilités. Quel plaisir! Nous avons des tâches pleines de sens!

(17)Confiance

Nous nous faisons mutuellement confiance! Chacun d’entre nous est en mesure de faire un cours! Lorsque nous sentons que le cours n’avance pas bien, nous nous aidons mutuellement en nous donnant des conseils!

(18)Visualisation

Nous relions toujours le nouveau savoir à celui dont nous disposons déjà. Entre les neurones se créent sans arrêt de nouveaux liens (des synapses: les liens deviennent stables quand ils sont liés à des émotions positives!), que nous visualisons par des dessins et des tableaux. De cette facon il est plus facile des les mémoriser!

(19)Construction de savoir:

Voir la classe en tant que cerveau

(20)Bonheur!

Conditions nécessaires: GFK (Gewaltfreie Kommunikation = communication pacifique/non-agressive) et connaissances sur les neurosciences!

 

Notre TOP 5

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Nous comprimons!

  1. Comportement explorateur – culture de la faute (trial and error)
  2. La classe en tant que cerveau – construction collective de savoir > flow!
  3. Visualisations
  4. Modèle anthropologique
  5. Confiance et transparence

 

Ces documents montrent à quel point les élèves sont capables dès le plus jeune âge de conceptualiser à un haut niveau. Si le traitement de l’information et la conceptualisation sont vraiment des sources de bonheur, il est devoir d’élargir les possibilités pour les élèves de fournir des performances intellectuelles de haut niveau. La méthode Lernen durch Lehren (LdL) (Learning by teaching) est un moyen pour atteindre ce but.

 

Literatur

Aristoteles (2010). Das Glück des Philosophen. In: Michel, S. (Hrsg.) (2010). Glück. Ein philosophischer Streifzug. Frankfurt am Main: Fischer Verlag. S.9-17

Berger, L., Grzega,J., Spannagel, C. (Hrsg.) (2011). Lernen durch Lehren im Fokus. Berichte von LdL-Einsteigern und LdL-Experten.Berlin: Epubli

Bormans, L. (Hrsg.) (2011). Glück.The Worldbook of Hapiness. Köln: Dumont

Cau, L. (2015). Lernen durch Lehren – ganz konkret. In: Pädagogik. Heft 02/2015, S. 20–23.

Csikszentmihalyi, M. (1999). Lebe gut! Wie Sie das Beste aus Ihrem Leben machen. Stuttgart: Klett-Cotta

Dörner, D. (Hrsg.) (1983): Lohhausen. Vom Umgang mit Unbestimmtheit und Komplexität. Bern: Huber

Grzega, J. (2011). Das Leben für Lerner und Lehrer spannender machen. Eine Einführung in LdL. In: Lutz Berger et al. (2011), S.11-19

Martin, J.-P. (1985). Zum Aufbau didaktischer Teilkompetenzen beim Schüler.  Fremdsprachenunterricht auf der lerntheoretischen Basis des Informationsverarbeitungsansatzes. Tübingen: Narr Verlag

Martin, J.-P. (2002). Weltverbesserungskompetenz als Lernziel?. In: Pädagogisches Handeln – Wissenschaft und Praxis im Dialog. 6. Jahrgang, Heft 01/2002, S. 71–76.

Martin, J.-P. (2004). „Lernen durch Lehren“: quand les apprenants font la classe“. Cahiers de l’Apliut. Vol.XXIII Nr.1. https://apliut.revues.org/3439

Martin, J.-P. (2009): Lernziel Partizipation und Netzsensibilität. In: Oebel G. (2009) (Hrsg.). S.115-127

Martin J.-P. (2011a). Wie verhalten sich Neuronen?  In: Lutz Berger et al. (2011), S.31-33

Martin J.-P. (2011b). Basisregeln für Internetprojekte. In: Lutz Berger et al. (2011), S.35-37

Maslow, A. (1981). Motivation und Persönlichkeit. Hamburg: Rowohlt

Oebel G. (2009) (Hrsg.): LdL – Lernen durch Lehren goes global: Paradigmenwechsel in der Fremdsprachendidaktik und kulturspezifische Lerntraditionen. Hamburg: Verlag Dr. Kovac.

Oesterreich, R. (1981) Handlungsregulation und Kontrolle. München: Urban & Schwarzenberg.

Portele, G. (1975): Lernen und Motivation. Weinheim und Basel: Beltz

 

Auteur

Jean-Pol Martin, né en 1943, a effectué ses études secondaires à Paris. Il fit des études d’allemand à Nanterre de 1964 à 1969. En 1969, il partit pour l’Allemagne où il s’installa définitivement: Études romanistique-germanistique à Erlangen de 1971 à 1975, doctorat de 3e cycle en 1985, doctorat d’État (HDR) en 1994. De 1980 à 2008: professeur de français langue étrangère à l’Université d’Eichstätt-Ingolstadt.

 


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2 Antworten zu “Enseigner pour apprendre (LdL): La conceptualisation comme source de bonheur”

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